Originaires de la région du Nord Cameroun, ces conducteurs de motos-taxis peinent à s’intégrer parmi leurs collègues de la capitale économique camerounaise.
Secteur des motos-taxis : les «Babanas» de Douala crient à la discrimination
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Secteur des motos-taxis : les «Babanas» de Douala crient à la discrimination

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Originaires de la région du Nord Cameroun, ces conducteurs de motos-taxis peinent à s’intégrer parmi leurs collègues de la capitale économique camerounaise.

Ahmed débute le travail de bonne heure. Svelte comme sa propre moto, il est vêtu malgré la chaleur de ce 28 juin 2022, d’un pullover fermé jusqu’au cou et d’un jogging noir. Au-dessus de ce pull, il arbore une chasuble bleue, légèrement déchirée  à l’épaule droite.  Sur sa tête,  un bonnet noir lui sert de bouclier contre les rayons du soleil. A distance, on les reconnait par leur mélanine très foncée et leurs motos silencieuses de marque «Baja».

Ce mardi, le carrefour Ndokoti grouille de monde. Les conducteurs de motos ressortissants du Nord Cameroun dominent les lieux. Certains stationnent de part et d’autre pour attirer l’attention des clients. D’aucuns, ont transformé leurs motos en dortoirs. D’autres, discutent, fument  des cigarettes et boivent du chaï (thé).  «Ô les Babanas-là, qui a deux billets de mille francs?», «Babana pousse un peu ta moto là!», lancent  leurs semblables d’un ton moqueur.

Ces ressortissants de la partie septentrionale du Cameroun sont surnommés ainsi par leurs collègues de la route par rapport à «certains critères», disent-ils. «On les appelle ‘’Babana’’ à cause de leur culture, leur langue et leurs comportements qui sont différents des nôtres», justifie Ernest, conducteur de moto-taxi. Karence ajoute: «C’est parce qu’ils sont musulmans. Aussi, leur façon de rouler sur la route est différente de nous autres benskineurs. Ils sont d’ailleurs illettrés».

Selon leurs pairs, les «Babanas» ont des comportements «bizarres». Cédric Désiré de s’indigner : «Ils sont impatients, imprudents et incompréhensifs. Ils sont toujours pressés quand ils roulent et ils sont violents». Ernest accuse : «Ils sont toujours sur la défensive et très agressifs. Ils ne  respectent pas  le code de la route. Je dirais même qu’ils n’en ont jamais entendu parler. Si on regarde les statistiques, on verra qu’au moins à 95%, les Babanas sont ceux qui causent les accidents et en sont également  victimes».

Lamentations

Pour les ‘’Babanas’’, les accusations portées contre eux sont infondées. A leurs yeux, c’est de la pure «discrimination».

 «C’est vraiment malsain ce qu’ils disent de nous. A entendre cela, mon cœur saigne. Ce n’est pas seulement eux, même les clients nous accusent de tous les maux sur la route. C’est déplorable!», se désole Abdoul Nasser, conducteur de moto-taxi.

Ahmed, lui, se lamente non sans accuser: «Eux aussi ils causent et  font les accidents. Lorsqu’on sort c’est pour chercher l’argent. Même si c’est au péril de notre vie on se lance. Nul  ne prévoit faire  un accident dans sa vie. Pourquoi rejeter la faute sur nous?».

«Babana» est une expression en langue Haoussa qui signifie «Mon ami» ou «Ma personne». Pour ces conducteurs, cette appellation ne prête pas à discrimination car disent-ils, «entre Camerounais, nous sommes tous des amis, des frères».

Fadira Etonde, stagiaire

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