"La succession politique à Paul Biya au sommet de l'Etat (puisque c'est ce qui intéresse aussi les acteurs politiques) va se jouer au sein du RDPC. "
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RDPC : flammes, envolées et renouvellement. Les élections d’après et/ou d’avant ? 

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Le RDPC renouvelle ses organes de base et les scènes que l’on retient le plus (par l’intermédiaire des réseaux sociaux) sont celles d’un barrage routier, d’une sous-préfecture incendiée (encore qu’il faut établir les responsabilités), de missives et tracts de protestation, de vidéos diverses de militants en colère. Cette vision appelle à chercher à comprendre ce déchaînement « soudain » de violence.

Dans cet exercice du jeu politique, poser la question de savoir à partir de l’incendie d’une sous-préfecture si le RDPC (dans ce déchaînement de passions) pourrait survivre à Paul Biya revient à chercher à comprendre les déterminants des batailles politiques et les motivations des acteurs.

La deuxième question est celle de savoir pourquoi la base (nous dirions les élections à la base) agitent autant de monde.

Quelques points s’imposent pour saisir et cerner ses enjeux politiques. 

1- La politique est un jeu de passions. Ces passions sont construites sur la base des ressources que les acteurs mobilisent (ressources financières, ressources symboliques, ressources stratégiques comme les positions dans les appareils institutionnels, capacité de mobilisation politique des soutiens électoraux ou tout simplement humains).

Cette mobilisation en fonction des enjeux du moment peut prendre des formes diverses et parfois violentes (insurrection, casse des ambassades, incendies ou marches). Cette violence a toujours été présente mais elle est amplifiée par la magie des réseaux sociaux qui deviennent de vrais moments de l’histoire immédiate.

2- Le RDPC est la matrice logique de l’ancien parti unique qui trouve son ancrage dans l’appareil institutionnel d’Etat. L’article premier des statuts du RDPC est d’ailleurs suffisamment explicite : le parti qui s’appelait UNC prend à compter de ce jour la dénomination de RDPC.

3- La succession politique à Paul Biya au sommet de l’Etat (puisque c’est ce qui intéresse aussi les acteurs politiques) va se jouer au sein du RDPC. Par conséquent celui qui tiendra l’Etat aura la mainmise sur l’appareil politique RDPC. De plus, pour continuer à bénéficier des ressources liées au jeu politique et participer à la capture des trophées politiques, les élites actuelles du RDPC n’auront d’autre choix que de se soumettre au détenteur du pouvoir institutionnel à savoir le président de la République. Le président Ahidjo en a fait les frais quand il a voulu mettre le parti au dessus de l’Etat.

4- L’histoire des transitions politiques en Afrique enseigne que les anciens partis uniques n’ont pas complètement disparu. Ils se sont ajustés et reconfigurés. Et quand ils sont passés dans l’opposition, ils ont su « faire dos rond ».

En effet, les opposants arrivant au pouvoir n’ont pas souvent tardé à montrer leurs limites face à l’épreuve du pouvoir et de la gestion des affaires publiques.

Et là comme des deus ex machina, les anciens partis uniques ont resurgi pour s’imposer ou jouer les arbitres (Bénin, Congo-Brazzaville, Côte d’Ivoire).

5- Le leadership au sein des anciens partis gouvernants est articulé autour de la personne du président de la République et en fonction de ses ressources tient main ferme sur les autres acteurs politiques. La paix des braves pour ne pas tout perdre entraîne et oblige les anciens thuriféraires du système à se remettre ensemble.

6- Le nouveau leadership qui prend le pouvoir peut éclater mais il reste toujours un noyau dur pour soutenir la pertinence de l’ancien système quand bien même l’ancien parti unique passe à l’opposition. Et dans ce cas, il éclate en plusieurs factions qui se disputent un héritage sur la base d’un passé commun pour revenir au pouvoir. Les coalitions politiques font le reste.

7-  Les nouvelles formations politiques (comme le PCRN) ou très brulantes (comme le MRC) seraient-elles prêtes à ouvrir leurs portes aux militants qui composent l’élite du RDPC ? À l’évidence, si cela n’est pas impossible, il se trouve que l’on ne peut accueillir une ancienne élite du RDPC sans lui donner une place de choix dans l’appareil institutionnel du nouveau parti. C’est d’ailleurs ce qui justifierait que ces élites partent du RDPC pour rejoindre ces formations politiques. Et les militants actuels de ces formations politiques s’en trouveraient relégués au second rang parce que les anciennes élites de l’ancien parti unique viendraient prendre leurs places. Une seule raison expliquerait cela : les ressources qu’elles peuvent mobiliser (nous en avons parlé au début).

Par ailleurs, dans les formations politiques dites de l’opposition, l’on se bat pour détenir l’appareil au sommet afin de jouer les distributeurs de prébendes à la base. L’UNDP en a fait l’expérience dès les premières années de l’ouverture démocratique. L’AFP, l’UDC, l’UPC, le FSNC et bien d’autres partis politiques payent ce prix. La bataille épique entre les deux députés SDF du Wouri (Josuah Ocih et Jean Michel Nitcheu) en est la preuve pour la succession au Chairman Ni John Fru Ndi. C’est à qui sera le futur président du parti politique.

8- Dans les partis politiques de l’opposition, le sommet tient la base et les batailles pour les circonscriptions locales sont difficiles car les trophées politiques sont rares.  On « fabrique » d’abord la tête du parti avant de lui donner un habillage/ancrage territorial. Résultat : plusieurs partis politiques n’existent qu’à travers l’acte de légalisation du Ministre de l’administration Territoriale.

Au sein du RDPC, les élites et la base se tiennent dans un ballet imbriqué. Entre répulsion et attraction, les élites et la base se côtoient mutuellement. La force d’un décret peut rapidement transformer un individu à la base en élite et une élite peut rapidement perdre sa position par la force du décret.

9- Le RDPC a tout à donner et tout à offrir. Sa mainmise sur l’appareil d’Etat justifie amplement ses batailles pour le contrôle et la capture des trophées politiques.

10- Pour que le RDPC ne survive pas à Paul Biya, il faudrait donc réunir certaines conditions dont la plus simple est le changement de dénomination de la part du successeur au Président Paul Biya pour marquer une forme de rupture. Il faudrait que les élites s’auto-sabordent dans une nuit de longs couteaux. Elles auraient trop à perdre à ce jeu.

11- Le RDPC peut se retrouver dans l’opposition. Peut-être en plusieurs morceaux mais on ne peut se prononcer de manière péremptoire la disparition d’un parti politique.

12- Les batailles politiques actuelles avec les passions, parfois violentes, qu’elles déchaînent sont la preuve d’un positionnement stratégique des acteurs pour mieux asseoir leur mainmise sur la capture des trophées politiques. Et ce n’est pas surprenant qu’elles soient plus âpres dans les « bastions naturels » du RDPC car c’est à ce niveau que les acteurs devront faire preuve d’un attachement et d’une grande allégeance au président de la République.

Le président de la République a le contrôle sur l’Etat et chaque acteur du moment veut être dans le bon wagon quand le train sera en marche.

Alphonse Bernard Amougou Mbarga, Enseignant de Droit et de Science politique à l’Université de Douala 

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