Déclaration solennelle du Prince des Bele Bele Kum’a Ndumbe III, Successeur au trône de Lock Priso Bell/Kum’a Mbape Bell, Professeur Emérite des Universités, sur Les négociations en vue du rapatriement des œuvres de pouvoir, de culte et d’art camerounais en Allemagne
Prince Kum'a Ndumbe III
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Rapatriement des biens culturels camerounais en Allemagne : Kum’a Ndumbe III dénonce « les pratiques de hold-up » de Yaoundé  

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Déclaration solennelle du Prince des Bele Bele Kum’a Ndumbe III,
Successeur au trône de Lock Priso Bell/Kum’a Mbape Bell,
Professeur Emérite des Universités, sur Les négociations en vue du rapatriement des œuvres de pouvoir, de culte et d’art camerounais en Allemagne

Compte tenu de l’urgence de l’heure, nous déclarons publiquement :

Nous adressons nos remerciements sincères au Chef de l’Etat du Cameroun, Monsieur Paul Biya, d’avoir donné son haut accord pour la restitution du Tangué de Lock Priso Bell/Kum’a Mbape Bell dans le cadre des négociations entre le Cameroun et l’Allemagne. Pour l’instant, c’est le seul haut accord qui existe dans les documents officiels du Comité Interministériel.

Le Ministre des Arts et de la Culture, Monsieur Bidoung Mkpatt, Président du Comité Interministériel chargé du Rapatriement des biens culturels camerounais illégalement exportés à l’étranger, a convoqué une réunion de concertation stratégique à la salle de convivialité du Musée National le jeudi 28 décembre 2023 dès 11 heures.

Nous remercions Monsieur le Ministre d’avoir eu la décence de nous associer aussi à cette réunion stratégique pour une concertation globale. Nous avons échangé pendant plusieurs heures et pensions que nous étions en train de dialoguer quand à la fin, le Directeur du Musée National, Dr. Hugues Heumen Tchana se rendit au pupitre pour lire la déclaration finale devant les médias.

Cette déclaration n’était autre que les « Résolutions de la rencontre inclusive relative au rapatriement des biens culturels camerounais en Allemagne », document confectionné bien avant la rencontre à l’insu des participants, et qui ne tenait aucunement compte des discussions et observations des participants à la réunion stratégique. Du moment où pendant toute la rencontre ce document n’a jamais été discuté, il ne peut être compris comme « résolutions » de la réunion et à partir de là n’engage que ses auteurs. Cette méthode d’utiliser la liste des participants avec leurs signatures comme acte de présence et la photo de famille et de les adjoindre à des « résolutions » confectionnées par quelques-uns mais n’ayant jamais été discutées est bien connue au Cameroun.

Nous dénonçons ces pratiques de hold-up et disons qu’il n’est pas admissible de procéder de cette manière pour des discussions internationales de haut niveau qui engagent la nation. Un fonctionnaire ne devrait pas se couvrir du manteau de l’Etat pour engager le pays sur des voies de violences à prévoir.

Le comité interministériel chargé du rapatriement des biens culturels camerounais est né non pas par décret, mais par arrêté ministériel du Ministre des Arts et de la Culture le 06 octobre 2022, et les membres nommés le 25 janvier 2023, donc il y a à peine un an deux mois, et il a la prétention d’être, selon cette résolution, « la seule interface du Cameroun dans toutes les démarches de restitutions »

D’autre part, selon ce document, « Au Cameroun, la restitution des biens culturels est une affaire d’Etat à Etat » et le « lieu de stockage définitif des objets est l’affaire d’une discussion entre l’Etat et les communautés » et enfin, « toutes interventions des pays étrangers dans les communautés doivent se faire avec l’autorisation du comité interministériel chargé du rapatriement »

Connaissant les experts allemands de très haut niveau scientifique qui dans différentes instances publiques et privées gèrent cette question de rapatriement de biens culturels et d’ossements humains, et appréhendant la composition du comité interministériel plus composé de fonctionnaires que d’experts camerounais spécialistes de la question, nous avons proposé au Premier Ministre, au Ministre des Arts et de la Culture, au Ministre de l’Enseignement Supérieur le  13 janvier 2023, il y a donc un an, « l’intégration du Prince Kum’a Ndumbe III et de la Fondation AfricAvenir International dans l’expertise du Cameroun sur la restitution de la mémoire collective au Cameroun, la restitution des objets de culte , de puissance et d’arts camerounais, ainsi que des ossements humains de Camerounais en Allemagne et en France »

Nous n’avons jamais eu de réponse et nous constatons au fil du temps le déséquilibre criard dans la composition des deux délégations allemande et camerounaise.

Nous publions des résultats de nos recherches scientifiques sur les relations entre l’Allemagne et l’Afrique ou le Cameroun depuis 1970, soit depuis 54 ans, et 80 livres différents et 150 articles de notre plume sont disponibles. Notre revendication spécifique de restitution de nos biens culturels avec une diplomatie culturelle active a commencé en 1998, soit depuis 26 ans. Nous proposions alors, dans ladite correspondance qui n’a jamais eu de réponse ceci : « le gouvernement camerounais pourrait, s’il le souhaite, bénéficier de cette expertise internationale accumulée depuis plus de cinq décennies par un Camerounais, au moment où il constitue des délégations pour discuter avec les gouvernements allemands et français sur ces questions »

Le gouvernement est libre de coopérer avec qui il veut, ce sera pour le bien ou pour le malheur de notre pays et de notre peuple.

Nous recevons des diplomates de haut niveau depuis l’ouverture de la Fondation AfricAvenir International à Bonabéri en 1985, soit depuis 39 ans, et les derniers en date furent reçus le 15 décembre 2023. Cette délégation du gouvernement allemand fut conduite par le Directeur de la politique culturelle à l’étranger, Mr. Stefan Rössel, accompagnée par S.E. Madame l’Ambassadeur Corinna Fricke et les discussions eurent lieu en présence de Monsieur le Gouverneur de la Région du Littoral, Mr. Samuel Dieudonné Ivaha Dibua. Les discussions concernaient la suite des négociations menées depuis 1998 sur le retour du Tangué de notre grand-père Kum’a Mbape Bell/Lock Priso Bell dérobé le 22 décembre 1884 dans son Palais à Hickory Town, Bonabéri. Le Directeur Stefan Rössel déclarera à la fin : « Le Tangué de Lock Priso Bell va revenir bientôt. Toutes les instances allemandes sont d’accord. Il ne reste plus que des problèmes administratifs à  régler ». Déclaration sur le sol de Bonabéri d’il y a à peine un mois. Le Ministre des Arts et de la Culture est furieux que la délégation soit venue voir directement le Prince et d’autres acteurs, sans passer par le Ministre qui, avec son directeur du Musée National, veut présenter les résultats des négociations avec l’Allemagne comme un trophée diplomatique de ses services et du Comité Interministériel qu’il préside.

Pendant que le Chef de l’Etat Paul Biya donne son haut accord pour la restitution du Tangué officiellement réclamé par le Prince Kum’a Ndumbe III, le document du Comité Interministériel sur la « Stratégie nationale pour la mise en œuvres des activités de rapatriement des biens culturels camerounais… » attibue le Tangué non pas au Prince, mais au Canton Bele Bele et à son chef imposé par l’administration en 2003, mais qui n’est pas un descendant de Lock Priso Bell et qui n’a jamais réclamé officiellement ce Tangué, comme l’affirmait le Musée des Cinq continents encore en juin 2023.

Nous avons reçu ces dernières années à la Fondation AfricAvenir International des ministres du gouvernement camerounais, des gouverneurs de région, des rois et chefs traditionnels, des ambassadeurs allemands, sénégalais, israélien, des diplomates français de haut rang, des représentants de l’UNESCO, sans jamais mettre en cause l’autorité de l’Etat. C’est l’image du Cameroun qui sortait toujours rehaussée. La « Déclaration de Bonabéri sur le Dialogue et l’action en faveur de la restitution des objets de culte, d’art, des manuscrits et documents africains » du 28 août 2018 fut signée par plusieurs rois camerounais et contresignée par l’UNESCO. Le gouvernement camerounais n’intervenait pas encore, et nous étions en pleine diplomatie culturelle.

D’autre part, AfricAvenir International a une succursale à Berlin depuis 2001, soit depuis 23 ans, très active sur la dénomination des rues portant les noms d’anciens colons, le rapatriement des œuvres de pouvoir, de culte et d’arts et des ossements aux pays africains. Cette section gère actuellement un projet de 3 ans financé par l’Allemagne pour « Décoloniser les écoles de la capitale Berlin et lutter contre le racisme »

Compte tenu de ces activités de négociations avec les autorités allemandes par exemple sur le Tangué de Lock Priso Bell depuis 26 ans, nous rejetons avec force la déclaration du directeur du Musée que le Comité interministériel né il y a moins d’un an et demi serait « la seule interface du Cameroun dans toutes les démarches de restitutions » Cela ressemble, encore une fois, à un hold-up.

Le Palais de notre grand-père Kum’a Mbape Bell a été bombardé par la marine allemande, les « objets » de pouvoir et de culte ont été dérobés au prix du sang, et nous n’avons pas négocié pendant 26 ans avec les autorités allemandes dans un esprit de dialogue et de paix pour que ces « objets » aillent érer dans un espace des anciens colonisateurs à Yaoundé. Les butins de guerre des Allemands sur le sol de Hickory Town reviendront à Bonabéri. Il y a des choses qui ne sont pas négociables. Tout comme le trône du Roi Njoya encore au Musée Humboldt à Berlin n’a rien à voir à Yaoundé. Il devra fouler le sol des Bamouns au plus vite.

Selon le document déjà cité,

« Au Cameroun, la restitution des biens culturels est une affaire d’Etat à Etat » et le « lieu de stockage définitif des objets est l’affaire d’une discussion entre l’Etat et les communautés » et enfin, « toutes interventions des pays étrangers dans les communautés doivent se faire avec l’autorisation du comité interministériel chargé du rapatriement »

L’Etat du Cameroun existe depuis 1957, soit 73 ans après le bombardement du palais royal de Lock Priso Bell. Notre première pièce de théâtre en langue allemande sur la réhabilitation de nos héros pendant la période coloniale allemande « Ach Kamerun ! Unsere alte deutsche Kolonie… » (Ah oui, le Cameroun, notre ancienne colonie allemande) a été écrite le 4 janvier 1970, et notre livre sur « Das Deutsche Kaiserreich in Kamerun » (le Reich allemand au Cameroun 1840-1910) a été présenté comme mémoire de maîtrise à l’Université de Lyon avec « mention très bien » en juillet 1970. Il y a donc 54 ans, et aujourd’hui, nous devons nous entendre dire que l’Etat du Cameroun serait le seul interlocuteur pour négocier le rapatriement de nos « objets » dont nous avons déjà négocié avec succès le rapatriement ?

Nous le disons clairement : ce n’est pas recevable

Nous avons attiré l’attention des participants à la réunion du 28 décembre 2023 que le Tangué de Lock Priso Bell a été protégé officiellement comme propriété intellectuelle et marque déposée du Prince Kum’a Ndumbe III par l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur de l’Union Européenne à Alicante, et par l’Organisation Africaine de la Propriété intellectuelle (OAPI) à Yaoundé depuis 2015.

Nous conseillons ceux qui veulent à tout prix empêcher que les biens culturels de Lock Priso Bell ne reviennent à sa famille de se préparer à affronter les tribunaux internationaux.

Le Tangué de Lock Priso Bell et le trône royal du Roi Njoya ne sont que des exemples. Le gouvernement du Cameroun devra bien comprendre qu’il s’agit de « biens appartenant aux royaumes anciens constitués ».

Nous lançons un appel solennel au gouvernement du Cameroun, au gouvernement de la République fédérale d’Allemagne et à leurs Länder, à la société civile qui s’est battue jusqu’alors pour sauver la mémoire collective de nos peuples africains et rétablir ainsi des relations saines et égalitaires avec les anciennes nations esclavagistes et colonialistes : Insistons ensemble avec sagesse sur un dialogue franc et sincère.

Travaillons pour la réconciliation, prévenons les conflits internes et entre nations, construisons un monde qui permettra l’épanouissement de chaque citoyen sur cette planète terre.

J’ai dit !

Fait à ancien Hickory Town, Bonabéri, le 13 janvier 2024

Le Prince des Bele Bele Kum’a Ndumbe III,
Successeur au trône de Lock Priso Bell/Kum’a Mbape Bell,
Professeur Emérite des Universités (Université de Lyon II, Université de Yaoundé I, Université Libre de Berlin),
Dr. en Etudes germaniques, Dr. en histoire, Habilitation en sciences politiques.

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