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Diaspora utile, diaspora inutile

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Diaspora utile, diaspora inutile

Par Paul Ella

Au-delà de sa présence hors du sol africain, notre diaspora devrait se définir et se faire remarquer par son rôle actif et assumé dans la destinée du continent. Bon nombre d’africains installés hors du continent y sont arrivés par aventure, souvent par fascination du mythe d’un occident qui leur aura été vendu comme la solution à toutes leurs misères. Mais la désillusion est toujours brutale. Initialement partis pour vivre enfin le bonheur tant espéré, dans un monde connu à travers la télévision et le cinéma, les aventuriers africains obsédés par l’expérience occidentale se retrouvent face à une réalité toute autre. Quand ils n’ont pas eu la chance d’avoir des parents fortunés pour les faire voyager dans des conditions convenables, ils se retrouvent en terre promise après avoir passé des années à saigner leurs familles financièrement pour rejoindre des embarcations de fortune, après s’être fait arnaquer à plusieurs reprises, et après avoir vendu tous leurs biens et abandonné leurs emplois. Ceux qui ne sont pas morts dans l’aventure de la méditerranée se retrouvent en occident, errants comme de mauvais esprits, dans une misère indicible. Et leur rêve occidental se révèle très vite être leur pire cauchemar. Par instinct de survie, nos frères et sœurs se soumettent alors à toutes sortes de compromissions dégradantes, pour garder la tête hors de l’eau. La triste réalité, c’est que l’écrasante majorité des africains en occident se retrouve ainsi dans une précarité désolante, ceux qui y mènent une vie décente constituant l’exception. Pourtant, ces africains en sursis permanent s’entêtent à rester en occident pendant toutes ces années, le retour en Afrique étant perçu comme un aveu d’échec. Et pour entretenir le mythe d’une prétendue réussite en occident, nos diasporiens se serrent la ceinture et cravachent dur quand ils programment des voyages en Afrique, question d’avoir suffisamment d’économies pour en mettre plein la vue à leurs compatriotes restés au pays. Entre virées nocturnes où champagne et whisky coulent à flots et locations d’appartements meublés haut-standings assortis de véhicules de luxe empruntés pour la circonstance, tout le grand jeu d’illusion est déployé le temps de leur court séjour, avant de retourner dans l’impitoyable misère qui les attend en occident. Triste modèle d’existence. Cette diaspora égarée se contente d’exister, de paraître, de critiquer, de pavoiser et de dire ce qu’il faudrait faire, sans jamais s’impliquer ni prendre la moindre initiative. Elle plébiscite tous les vices de l’occident qu’elle sublime, et est toujours la première à vilipender l’Afrique et les africains. Cette diaspora là n’est d’aucune utilité pour l’Afrique, elle en fait le déshonneur. Reniant ses origines, souvent de façon revendiquée et ostentatoire, elle est pourtant rejetée par l’occident institutionnellement raciste, ce qui fait d’elle une espèce errante, sans repères et sans avenir dans aucun compartiment de la terre. Elle finit souvent seule, abandonnée à sa bêtise et à ses regrets, mais il est toujours trop tard.

Mais il existe une autre diaspora consciente, la moins nombreuse certes, qui se mobilise et s’organise pour la terre-mère. De façon visible ou discrète, cette diaspora n’a jamais arrêté de croire en l’Afrique et travaille sans relâche à son rayonnement. Elle ne se contente pas de scander son amour pour l’Afrique et ne se limite pas aux apparences folkloriques. Elle soutient les causes panafricaines et s’intéresse de près à l’actualité, mène des réflexions constructives et s’implique dans les actions qui vont dans le sens de restaurer l’Afrique dans sa dignité. Elle n’a pas vocation à s’éterniser en dehors du continent. Elle est organisée et a une vision bien précise de sa présence en terre étrangère qui ne constitue qu’une étape et non une finalité. Quel que soit le nombre d’années passées hors du continent, elle envisage son retour pour porter main forte aux initiatives de reconstruction de l’Afrique. Quelle que soit sa localisation géographique, elle porte l’Afrique dans son cœur et dénonce avec fermeté tous les complots impérialistes contre son autodétermination. Elle sait que le monde change, et que l’horloge de l’histoire tourne en faveur de la Renaissance Africaine.

Aujourd’hui plus qu’hier, l’occident s’écroule et sa fin programmée est plus que jamais actée. Face à une reconfiguration géopolitique des cartes du monde, son mythe s’évapore inexorablement, retournant vers sa triste réalité originelle, longtemps occultée par des illusions de prospérité, celle d’une structurelle misère économique, morale, culturelle et spirituelle, d’avant les opportunes expéditions esclavagistes et coloniales, démarrées au 15e siècle. L’avenir de l’occident est manifestement des plus sombres. Aux africains avertis de lire les signes des temps et de réajuster stratégiquement leurs projets personnels et communautaires, avant que ne survienne le temps des pleurs et des grincements de dents.

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