L’intégralité de la tribune publiée ce mercredi 21 juillet 2021 par l’homme politique camerounais.
La situation est donc si grave et si désespérée pour qu’on en vienne à des formules messianiques pour sortir de l’ornière? Est-ce la seule réponse qui vaille pour lutter contre le désespoir et l’immobilisme?
Sur les plateaux de télévision, on parle de plus en plus d’un état failli, surendetté, corrompu jusqu’à la moelle. Le dégoût suinte de partout sans que rien décidément ne se décante.
Ce pays est-il statufié? Momifié? En coma dépassé? Qu’est devenu le Cameroun? La caricature de lui-même? Sur des chaînes privées des images défilent. Saisissantes. Cruelles.
Des compatriotes effroyablement mutilés par la maladie lancent des appels au secours au public. Des mères éplorées et suppliantes demandent qu’on vienne à leur secours. Leurs enfants sont mourants. Elles ont épuisé leurs ressources. Leur dénuement est tel que leur dignité s’efface.
Il est question de survie. Sommes-nous tombés si bas? Les services sanitaires de ce pays sont-ils à ce point si défaillant pour qu’on en vienne à ces images d’extrême déchéance humaine? Comment assure-t-on la prise en charge des indigents? De ceux qui n’ont plus que leurs yeux pour pleurer?
Est-ce la télé qui s’occupe désormais de la charité? Peut-on se satisfaire de ces images? Que nous disent-elles sur nous-mêmes et de notre pays?
L’expression oiseaux de malheur qui stigmatisait ceux qui dénonçaient les travers du régime et les excès des hommes au pouvoir n’est même plus de mise. Epuisée. Éculée. Galvaudée. Est-ce à dire que seule la prière peut encore venir au bout du désespoir?
Comment peut-on s’y résoudre? Ce n’est quand même pas le châtiment divin qui a fait classer notre pays et par deux fois comme le plus corrompu au monde?
Pourquoi jamais, rien ne change malgré les dénonciations et les exhortations à un réarmement moral? Comment retrouver le chemin de l’effort, du respect de la chose publique, et d’une bonne gouvernance?
La renaissance du Cameroun et son salut ne viendront pas en levant les bras au ciel et en mettant un genou à terre. L’espoir d’un nouveau départ ne peut venir que par de profondes réformes. Celles des cœurs et des esprits. Celles surtout de l’administration, de l’économie, de la justice et de la politique.
Est-ce que ceux qui sont dans les allées du pouvoir ou qui tiennent ses rênes sont les mieux à même de mener cette révolution des idées et des comportements? La politique du pire conduit au pire.
Quand s’arrêtera la casse sociale et le pillage pour amorcer un nouvel horizon? Le Cameroun est martyrisé et son image est abîmée. Ce pays qui leur a tant donné et qu’ils saignent sans état d’âme savent-ils qu’il est mortel?
Quand est-ce que les hommes qui nous gouvernent vont avoir ce sursaut d’orgueil et ce réflexe de survie pour se poser les seules questions qui vaillent ? J’ai beaucoup pris. Il faut que je commence à rembourser. J’ai beaucoup reçu. Qu’est-ce que j’ai donné en retour à ce pays qui a été une bénédiction pour moi, pour ma famille et pour mon clan?
La richesse d’un pays ne se mesure pas au montant de sa dette. Celle-ci bouche son horizon et sacrifie son avenir. Le pays se condamne à être dépecé par d’autres. Les pays sont des corps vivants. Ils sont par conséquent mortels.
Cyrille Sam Mbaka, homme politique
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