Nommé responsable de la communication et médias pour l’Afrique de l’Ouest et Centrale de l’Alliance internationale des BRICS, le 21 juin 2023 à Moscou par la présidente de l’organisation non gouvernementale Larisa Zelentsova, le journaliste camerounais, ancien présentateur vedette de la chaîne de télévision panafricaine « Afrique Media TV », parle de ses débuts, de son cahier de charges et de son projet éditorial dénommé « Panafrican Media TV ».
Mohamed Bachir Ladan est aujourd’hui responsable de la communication et médias de l’Alliance internationale des BRICS pour l’Afrique de l’Ouest et Centrale. Qu’est-ce que ça fait d’être dans cette peau ?
Avant tout, j’aimerais vous remercier. Remercier à la fois Didier Ndengue de La Plume de l’Aigle (www.ndengue.com) et Valgadine Tonga de La Voix du Koat (www.lavoixdukoat.com). C’est un immense honneur et un plaisir pour moi d’être interviewé par d’éminents journalistes que vous êtes et je sais de quoi je parle. Concernant cette nomination, en tant qu’être humain, vous pouvez bien deviner mon état d’esprit actuel. Chaque fois qu’il y a une bonne chose dans la vie d’un Homme, ce n’est qu’un effet de joie qu’on ressent.
Peut-on affirmer que votre nomination à ce poste est l’un des fruits de votre combat panafricain, parce que les faits attestent que vous avez été aux premières heures de ce réveil africain ?
Je réponds tout de suite par un OUI. Effectivement, quand j’ai été approché par nos amis de l’Alliance internationale des BRICS, je me suis dit que ça ne pouvait être que la suite du travail qu’on a fait en tant que panafricanistes et promoteurs également d’un monde multipolaire. C’est la vision même des BRICS en tant qu’institution et de l’Alliance internationale des BRICS qui est une organisation non gouvernementale au sein des BRICS. Ce n’est que la continuité de ce qui a été fait. Le panafricanisme, on le sait, beaucoup le définissent comme étant un humanisme. Et dans cet humanisme, nous sommes ouverts à toutes les organisations, pour ne pas dire à tous les peuples épris de paix et de justice. C’est le cas aujourd’hui de l’Alliance internationale des BRICS.
Comment naît d’ailleurs votre fibre panafricaine (Sur le terrain du journalisme, ou bien avant)?
Depuis ma tendre enfance, j’ai toujours eu pour modèle, de manière innocente, des hommes comme Thomas Isidore Sankara. J’avais entre 5 et 6 ans quand Sankara a été assassiné. Curieusement, quand j’ai vu comment mon père était affecté par son assassinat, ça m’a profondément attristé, alors que je ne savais même pas qui était ce Thomas Sankara. C’est en grandissant que j’ai pu m’approprier un peu l’idéologie qu’il défendait et du coup, j’ai envie de dire que je suis panafricaniste dans l’âme. Je n’ai eu l’occasion de le matérialiser qu’en exerçant la profession que j’ai toujours aimée, parce que je me considère comme l’un des privilégiés dans ce monde. C’est-à-dire quelqu’un qui a toujours rêvé d’être journaliste et finalement le dévient. C’est en exerçant cette profession que j’ai pu développer convenablement cet amour pour le panafricanisme.
Pour rester dans le champ du journalisme, où commencent vos premiers pas dans la profession?
A l’école, je côtoyais déjà le milieu des médias. Au secondaire, de la classe de 3ème en Terminale à Bertoua, dans la région de l’Est Cameroun, j’ai eu la possibilité de rencontrer un ami, un camarade de classe et aussi l’ainé Michel Ateba, qui exerce aujourd’hui dans le domaine du sport. Ces deux travaillaient à l’époque à la CRTV Est. J’étais encore sur les bancs. Bauvard Antoine Zanga et moi étions dans la même classe. Il m’a dit : « Bachir, tu as quelque chose d’intéressant qui peut être développé au niveau du journalisme. Viens rejoindre notre groupe au niveau de la CRTV ». Ils animaient un programme baptisé : « Horizon 2000 », quelque chose comme ça. Ils m’ont proposé d’intégrer leur équipe. Ce que j’ai fait en classe de Première. Quand je suis parti de la CRTV Est, je n’ai pas eu l’occasion d’exercer ailleurs. J’ai connu une très longue période de disette jusqu’à ce qu’un jour, Mohamed Awal, l’un de mes grands frères qui travaillait à Afrique Media TV comme chauffeur, m’approche au moment où la chaîne de télévision panafricaine faisait ses premiers pas. Il m’a retrouvé à Yaoundé et m’a proposé de travailler pour elle. J’étais découragé, il m’a remonté le moral et m’a dit qu’il reviendrait avec le directeur technique. Il est revenu avec Justin Fokom You pour installer les studios d’Afrique Media à Yaoundé. Je suis allé leur donner un coup de main. Justin m’a dit : « Ton grand-frère m’a dit que tu es journaliste. Essaie de rédiger une demande d’emploi, je vais la soumettre à l’appréciation du Président directeur général d’Afrique Media ». Je n’avais pas de quoi écrire. Il m’a donné 100 FCFA pour acheter un format A4 et une sous-chemise de couleur jaune. Ce que j’ai fait. J’ai écrit la demande à main levée sur place devant le monsieur. Je lui ai remis la copie, il est parti avec à Douala. Je vivais à Yaoundé à cette époque avec mon épouse. Quelques jours plus tard, je reçois un coup de fil d’Afrique Media TV depuis Douala. La personne au bout du fil me dit que je suis attendu lundi pour un entretien d’embauche. Quand elle a raccroché, j’ai appelé mon grand-frère Awal qui a confirmé et m’a demandé de descendre sur Douala le plus tôt possible. Il m’a passé le contact du directeur technique. Je lui ai expliqué que je n’avais pas d’argent pour le transport. J’ai demandé qu’il m’accorde une semaine, le temps pour moi de collecter un peu d’argent pour payer mon ticket de voyage. A l’époque je faisais dans la gravure et la vente des CD. Le directeur technique m’a dit qu’il n’y avait pas de problème, que je prenne tout mon temps pour me préparer. J’ai fait quelques petites économies durant une semaine. J’ai emprunté le bus. Quand j’arrive au siège d’Afrique Media TV, je m’attends à un entretien d’embauche. Le directeur technique me dit qu’il a déjà parlé avec le PDG et qu’il va me présenter à mes collègues. On m’a présenté aux équipes de la rédaction comme l’un des leurs. C’est ainsi que j’entre à Afrique Média. Aussi simple que ça.
Votre nomination à l’Alliance internationale des BRICS était-elle aussi simple ou préparée?
Il y a eu un cheminement, mais j’étais loin d’imaginer que ça allait aboutir à cette promotion. Le Docteur Awal Don Mello que je salue ici et que je remercie d’ailleurs, est le Représentant de l’Alliance internationale des BRICS pour l’Afrique de l’Ouest et l’Afrique Centrale. C’est quelqu’un que je connais depuis de nombreuses années. C’est un ancien Ministre de Laurent Gbagbo (ancien président ivoirien), un panafricaniste convaincu. Nous étions en contact depuis. On s’est rendu de nombreux services. C’est lui qui me fait appel quand on le nomme au patronat russe après la chute de Alpha Condé en Guinée. Il était le Conseiller spécial du Président Alpha Condé dans le domaine des infrastructures. Après cette chute, Don Mello devient le relais entre le patronat russe et l’Afrique. Quelques jours plus tard, il est promu à l’Alliance internationale des BRICS pour que ça soit un peu plus global. On a effectué une première mission au Sénégal. D’autres ont suivi dans de nombreux pays africains.
Je préparais tranquillement la fête du mouton (Tabaski), quand j’ai reçu un courrier, c’était le PDF. Je l’ouvre et je tombe sur le texte de nomination signé par la présidente Larisa Zelentsova, que je remercie. Elle nous considère tous au sein de cette organisation comme ses enfants. Elle est très maternelle.
Avez-vous déjà une idée de votre cahier de charges?
De manière vague, oui. Il s’agit pour moi d’occuper deux fonctions : responsable de la communication et des médias de l’Alliance internationale des BRICS. Au niveau de la communication, je dois, excusez-moi la tautologie, assurer la communication de l’Alliance où qu’elle soit. Je dois travailler avec ses responsables, recouper les informations la concernant, couvrir tous ses évènements et les publier au besoin. Parlant des médias, il s’agit de recenser ceux avec qui on peut travailler pour que les actions des BRICS Alliance sur le continent africain notamment en Afrique de l’Ouest et en Afrique Centrale aient la visibilité qu’elles méritent. Voilà de manière ramassée ce qui m’attend.
De journaliste à communicateur, c’est souvent le parcours de plusieurs journalistes. Mais allez-vous laisser tomber définitivement le journalisme ?
Je ne pourrais pas laisser tomber le journalisme. Même les dirigeants de l’Alliance internationale des BRICS ne seront pas d’accord. C’est ce journaliste dont l’Alliance a besoin pour son rayonnement sur le continent. Je continue d’exercer et je suis ouvert à toute forme de collaboration quel que soit le média.
S’il fallait s’arrêter un instant pour témoigner une gratitude à ceux dont vous avez croisé le chemin, qui seraient ces personnes ?
En tête de fil, je commencerai par monsieur Justin Tagouh, le Président directeur général de Afrique Media TV. Contrairement à l’image que certains ont de lui, c’est Justin Tagouh qui m’a forgé. Si le monde entier a pu découvrir Bachir, c’est parce que ce monsieur m’a fait confiance, là où beaucoup d’autres ont hésité. Il ne s’est pas arrêté là. Il m’a tenu la main et durant les 11 années passées à ses côtés, partout où il allait, j’étais plus ou moins présent. Justin Tagouh est celui qui m’a introduit auprès de tous ceux avec qui vous me voyez aujourd’hui. Certains me titillent souvent en m’appelant « le journaliste des Chefs d’Etat ». Je ne refuse pas, mais je n’ai pas voulu être « le journaliste des Chefs d’Etat ». Mon patron de l’époque était proche de certains dirigeants et il ne nous a pas fermé les portes. Il m’a fait côtoyer les grands de ce monde, où qu’ils soient. Après Justin Tagouh, je n’oublie pas mes parents qui ont accepté que j’exerce le métier que j’aime. Papa et toutes ses femmes. Tous m’ont soutenu, m’ont toujours encouragé. Mon frère Awal qui m’a présenté à Justin Fonkom You. Je remercie tous mes panélistes qui m’ont accompagné jusqu’ici. Je ne peux pas tous les citer, mais vous me permettrez de citer le Président Banda Kani du Nouveau Mouvement Populaire (NMP), qui a été très paternel. Patient Parfait Ndom, Simo Nde, Maître Momo Janvier, Dalvarice Ngoudjou, Edmond Kuaté, Jonathan Batenguene, Charly Kengne, Bertrand Tatsinda, Jules Njawe, André Christel Fanga, Luc Michel depuis la Belgique, Simon Bassilekin, Professeur Jean Paul Mbelleck…ils sont très nombreux, je ne saurai les citer tous. Il y en a qui ne sont plus de ce monde: Dr Paul Menessier (mon mentor), Nouha Sadio, Jean Arthur Awoumou. Que leurs âmes reposent en paix
Je n’oublie pas le dernier média pour lequel j’ai travaillé pendant 15 mois. For You Media Africa. J’ai beaucoup appris aux côtés du Président Serge Espoir Matomba. Nous gardons de très bonnes relations. Il m’encourage beaucoup dans mes nouvelles fonctions. Je remercie également tous ceux qui m’ont soutenu : Abdoulaye Sadou, le DG d’Afrique Media et par ailleurs PDG de HAUSA 7, Dr David Eboutou, Jean de Dieu Ayissi, le ministre Jean de Dieu Momo, François Bikoro, etc.
Les BRICS c’est l’avenir de l’Afrique, ou l’Afrique l’avenir des Brics ? Comment doit-on aborder la question?
Je ne m’attendais pas à celle-là (Rires). Les deux se complèteront. L’un a besoin de l’autre et vice-versa dans la mesure où l’Afrique a toujours été considérée comme ce pourvoyeur de matières premières, je prends seulement l’aspect économique. Du coup la relation avec le bloc occidental est une relation hégémonique. L’Occident cherche à dominer l’Afrique. Un partenariat gagnant-gagnant est impossible entre le continent africain et le bloc occidental parce que c’est dans leur culture, c’est dans leurs gènes. Pour eux, on se développe au dépend de quelqu’un d’autre. C’est tout le contraire des pays membres des BRICS. Quand ils viennent vers vous, c’est pour vous proposer un partenariat gagnant-gagnant. Un pays comme la Russie par exemple, va venir chercher quoi en Afrique ? C’est un pays continent. On retrouve en Russie tout ce dont le continent africain regorge en termes de matières premières. Pour répondre à la question, oui les BRICS ont besoin de l’Afrique tout comme l’Afrique a besoin des BRICS.
Pour sortir de notre entretien, pouvez-vous nous parler de votre projet éditorial « Panafrican Media » lancé il y a de cela deux mois?
Je ne vais pas trahir les secrets des dieux. L’un des intervieweurs ici, à l’occurrence Didier Ndengue, connaît ce projet très bien. Nous y avons travaillé depuis trois ans. Il m’a beaucoup accompagné sur tous les plans. D’ailleurs au niveau idéologique, c’est avec Didier que nous avons travaillé les premiers textes qu’on a mis en place pour le lancement de ce média. C’est un média panafricaniste pour ne pas dire panafricain, qui a à son sein, un média en ligne (www.panafricanmedia.tv) . Nous diffusons depuis quelque temps, en live streaming sur Youtube (Panafrican Media TV). C’est petit à petit avant de faire une montée satellitaire. Jusqu’ici, nous réussissons à produire ce que nous voulons et selon les attentes de nos followers. Le projet est là, avec l’appui des partenaires, je crois que d’ici peu, nous allons envahir les ménages. Pour rajouter quelque chose de très important, dans le cadre de ce projet, nous restons ouverts à toutes les collaborations. Comme je l’ai dit, j’ai travaillé pour Afrique Média et For You Media Africa, cela n’exclut pas que nous continuons à travailler ensemble.
Entretien mené par Didier Ndengue et Valgadine Tonga
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