La vie chez les proches des victimes du récent effondrement d’immeuble de la capitale économique camerounaise.
Sur la route qui mène au lieu-dit ‘’Mobil Guinness’’ dans l’arrondissement de Douala 5e, à quelques mètres du site de l’immeuble de quatre étages, qui a causé la mort de plus de 40 Camerounais, l’atmosphère de deuil est ressentie, les véhicules sont rares. Au fur et à mesure que nous nous rapprochons du lieu de l’accident, la route est de plus en plus déserte. L’entrée du site est barrée par un ruban de sécurité blanc et rouge. Un élément du Bataillon d’intervention rapide (Bir) monte la garde. « Bonjour, qui êtes-vous ? Où allez-vous comme ça ? Vous ne pouvez pas vous rendre là-bas car, ce lieu est dangereux et interdit à la population. Tout le monde ne peut y avoir accès », dit-il, d’un air nerveux.
Après plusieurs vérifications et contrôles, le reporter est autorisé à accéder sur les lieux du drame.
Il est 11h et 30 minutes ce 27 juillet 2023. Les fouilles se poursuivent sur le lieu du drame, pour retrouver certainement quelques corps sous les amas de parpaings et des dalles cassées dudit immeuble qui a détruit un autre bâtiment résidentiel R+1, dans cette folle nuit de samedi 22 à dimanche 23 juillet 2023, au quartier Ndogbong. La pelleteuse dégage les morceaux de béton sous une odeur de pourri et le ballet des mouches. Ceux qui observent la scène ont la même attitude : se pincer le nez. « Où il y avait les mouches là, c’est un os et la chair. Ce n’est pas un corps entièrement constitué », renseigne un sapeur-pompier placé à l’extrémité gauche du site, plus précisément au niveau de la résidence sur laquelle s’est écroulé l’immeuble R+4.
Cauchemar
Deux familles résidant dans le coin ont perdu leurs filles. La famille Teyim pleure une femme de 33 ans. Cette dernière s’était rendue chez son petit ami pour réchauffer le repas. « Son copain et moi étions à un voir-bébé à Pk 14 et vers 23h quand on rentrait, on l’appelle pour lui annoncer que l’immeuble s’est effondré. Sachant que ma sœur y était ce soir-là, c’est comme ça qu’on accoure et on trouve que tout était au sol. On a trouvé qu’après avoir sorti leur collègue militaire qui logeait dans l’appartement voisin à celui de mon beau-frère, les militaires qui étaient là ont arrêté les travaux et chassé la population. Nous sommes donc entrés nous-mêmes pour faire sortir ma sœur. Elle venait à peine de mourir car, son sang était encore frais quand on l’a sorti des décombres », se lamente le frère cadet de la trentagénaire. « Je me sens vraiment mal. Ma sœur, elle est partie trop tôt. Je ressens comme un grand vide à l’intérieur de moi », raconte-t-il, inconsolable. Leur mère n’en revient toujours pas : « Je n’arrive pas à croire qu’elle n’est plus », une expression de douleur.
La famille Tidjong dont le domicile a été localisé supra, regrette leur fille de 20 ans qui venait d’obtenir son Brevet de technicien supérieur (Bts) en comptabilité. Sa grande sœur, qui sort de cette tragédie avec quelques égratignures aux épaules, rapporte un bout de leur mésaventure: « Il était exactement 00h16. Je n’arrivais plus à trouver le sommeil et j’ai pris mon téléphone pour regarder l’heure. À peine je regarde l’heure, j’entends un grand bruit. Je sursaute et je me redresse sur le lit pour savoir d’où venait le bruit. Malheureusement je n’ai pas eu le temps de dire quoique ce soit, ni de comprendre ce qui s’est passé car, ça n’a même pas fait dix secondes après ce grand bruit que tout s’est effondré sur nous. Comme tout s’est affaissé, nous nous sommes retrouvées clouées sous le lit ». Leur mère, toute tremblante, « se sent très mal. Vraiment c’est une chose que je pourrais souhaiter à personne ».
Selon les riverains, l’effondrement de l’immeuble de ‘’Mobil Guinness’’ serait dû au fait qu’il avait été mal construit et au volume de la musique du soir du drame. « Il y avait trois fêtes dans cet immeuble la nuit du drame. Il y avait un voir-bébé, une fête d’anniversaire et la célébration du Baccalauréat. C’est certainement toute la musique jouée qui a causé l’effondrement de l’immeuble », pense un riverain.
Fadira Etonde
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