J’étais une petite élève de classe de 4ème au lycée général Leclerc. J’habitais en face du camp de police dans le bâtiment americanos à Ayene vers Ekounou. Non loin de ce camp se trouvait une partie de la Gp et l’aéroport de Yaoundé.
J’étais allée en congés de Pâques au camp de la Gp du marché Melen chez mon oncle gendarme. Ce corps de métier qui était recherché du fait de leur implication dans ce putsch. Pour échapper je ne sais comment à la persécution, quelques familles des gendarmes apeurés de n’avoir pas vu revenir le père, s’étaient lancés sous la conduite des mamans, sur l’ancienne route de Douala par Oyom Abang.
Très vite j’avais été récupérée je ne sais comment par mes parents qui m’avaient ramenée auprès de mes frères et sœurs à Americanos, non loin aussi de l’aéroport de Yaoundé.
Des petites lamelles des fenêtres des maisons des civils qu’étaient nos parents, situés en face de ce camp, nous avons vu nuit et jour des hommes en tenues au béret rouge être déportés dans ce camp qui abritait les services de la police, particulièrement un sous-sol sécurisé disait-on.
Dans les échanges de coups de feu stridents, nos murs ont reçu des coups de balle. Enfants nous étions entraînés par la peur des adultes. Mais la curiosité puérile de voir ce qui se passait dehors nous rendait instable et nous excitait.
Lors de la petite accalmie, les parents ont décidé d’amener toute la famille à l’EEC, paroisse de la Briqueterie de Yaoundé à Messa devenu camp des déplacés de la ville.
Là aussi nous avons traversé des spectacles désolants de guerre de Mvog Mbi à Messa, et singulièrement hors du domaine de l’ÉEC au vu de la proximité de Messa avec la briqueterie et le camp Yetap. A l’intérieur de cette église, de nombreuses familles étaient allongées au sol, avec pour seuls biens leurs enfants, des boîtes de sardines et quelques baguettes de pain pour les plus avertis.
Combien de jours a duré cette terreur? Une semaine devenue une éternité. Toujours est-il que lorsque nous sommes revenus à la maison, les murs extérieurs étaient meublés de trous de balle.
L’agitation observée des jours avant avait disparu mais la peur nous a habité pendant de longs mois encore.
C’est donc en août 1984 que la famille a été affectée à Bamenda. C’est là-bas que cette peur nous a définitivement quittés, même si ce triste souvenir reste présent et redouté.
Voilà ce que j’ai vécu ce jour-là et les jours suivants…
Eh oui. Lorsqu’on a vécu un tel évènement, on n’est plus le même.
Ce triste souvenir sera réactivé lors des années de braise à Bamenda dans les années 1990 où je séjournais en famille… il est réactive chaque fois que ça chauffe chez nous. C’était terrifiant. Je ne souhaite à personne de le vivre…
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