Le député Rdpc soutient que la formation de ce groupe parlementaire transpartisan est « illégal » et relève davantage de la « recherche permanente du buzz » chez ses collègues de l’opposition.
I. La représentation par le buzz et pour le buzz.
Ils ne sont pas aussi nombreux que cela à l’Assemblée nationale à cause de ce foutu système démocratique qui n’ouvre pas droit au repêchage tous azimuts, ou mieux encore, pour être proche de leur thèse, à cause de ce méchant parti, le Rdpc qui empêche une distribution des postes législatifs par gentillesse.
Ils ne sont pas nombreux, mais ils tiennent à se faire entendre ; normal, la démocratie et la vie publique en général exige de la visibilité. La visibilité certes, mais pas la visibilité à tout prix et à tous les prix. Dérogeant à cette règle de simple responsabilité, on les voit partout dans les télés, les radios, la presse, la rue, les gargotes, hurler leur vérité, leur vérité surtout révélée, leur condamnation du système gouvernant actuel qui ne comprend rien à rien, leur science infuse oubliant que l’époque d’Adam et Eve est un lointain, très lointain souvenir. Il leur arrive souvent d’apporter la même vérité révélée à l’hémicycle dans des séances de question au gouvernement, avant d’être repris et recadrés magistralement, par les ministres heureux de constater qu’on leur ouvre une vitrine pour briller. Sincèrement, je suis très peu fier d’être dans un hémicycle où on donne aux ministres des occasions d’être magistral.
Ils reçoivent des répliques magistrales, mais leurs questions finissent toujours dans les réseaux sociaux sans référence des réponses apportées par le gouvernement. Comme pour dire que, ce qui est important c’est le buzz des réseaux sociaux, pas la question en elle-même, ni la réponse apportée. La représentation par le buzz et pour le buzz.
Après de tels buzzs, ils reviennent aussitôt à la charge pour dire, vous voyez les députés de la majorité sont complaisants et ne posent pas les questions au gouvernement, ils ne participent pas au contrôle de l’activité gouvernementale. C’est faux, les députés de la majorité contrôlent mieux que quiconque l’activité gouvernementale mais se refusent de se donner en spectacle. Le gouvernement doit nous respecter. J’ai peur que ce respect soit brisé à travers les questions à réponse magistrale.
II. Un groupe parlementaire constitué exclusivement de députés apparentés
La nouvelle trouvaille pour le buzz de demain est la constitution d’un groupe parlementaire. Je rappelle qu’une telle demande vient des hommes politiques qui donnent des leçons de bonne gouvernance.
Sur le plan législatif, l’article 20 du règlement intérieur définit les conditions de formation des groupes parlementaires en ses termes : « (1) Les députés peuvent s’organiser en groupe par partis politiques. Aucun groupe ne peut comprendre moins de quinze (15) membres, non compris les députés apparentés.
(2) Les députés qui n’appartiennent à aucun Groupe peuvent s’apparenter à un Groupe de leur choix, avec l’agrément du Bureau de ce groupe, afin de pouvoir figurer sur sa liste électorale. »
La formulation de cet article ne laisse donc de place à aucun doute : Seuls les partis politiques sont autorisés à constituer un groupe parlementaire à condition d’avoir 15 députés se revendiquant du même parti.
C’est pourtant sur le fondement de cet article qu’une mosaïque de partis politiques s’appuie pour faire ce qu’ils savent faire le mieux : le buzz. Ils s’appuient en cela sur une erreur contenue sur les mots partis politiques sur lesquels ont été accolés deux fâcheux « s ». Pour eux la présence de ces « s » traduit la volonté du législateur de donner l’accès à la création de groupe aux conglomérats de partis donc aucun n’a 15 députés.
Permettez-moi de faire une analyse de cet article :
1. La notion de députés apparentés évoquée dans cet article n’a de sens que par rapport à une constitution de groupe parlementaire réservée au parti ayant un quota de représentants du peuple requis. Dans notre cas c’est 15 députés. On ne peut donc pas avoir un groupe parlementaire constitué exclusivement de députés apparentés. L’article 20 est clair, les apparentés n’entrent pas dans le décompte des effectifs nécessaires à la constitution du groupe. Est député apparenté à un groupe celui qui, faute de quota pour son parti pour former un groupe, décide de s’affilier à un groupe constitué et étranger statutairement à son parti. Dans le cas du groupe en question, nous avons devant nous 16 députés apparentés qui veulent créer un groupe. Le problème est que les apparentés n’entrent pas dans le décompte, on peut considérer que ce groupe a 0 (zéro) député.
2. Si le législateur avait envisagé une formation de groupe transpartisant, la notion de parti ne serait pas apparue dans la rédaction de l’article 20 : En rappel, « (1) Les députés peuvent s’organiser en groupe par partis politiques. Aucun groupe ne peut comprendre moins de quinze (15) membres, non compris les députés apparentés.
(2) Les députés qui n’appartiennent à aucun Groupe peuvent s’apparenter à un Groupe de leur choix, avec l’agrément du Bureau de ce groupe, afin de pouvoir figurer sur sa liste électorale. »
En droit comparé, la rédaction ci-après du règlement intérieur inspiré du système législatif français reconnait des groupes transpartisants : « les députés peuvent se regrouper par affinité politique ».
Il en est de même des rédactions suivantes :
Gabon : « les députés peuvent se réunir par affinités politiques pour constituer un groupe parlementaire »
Cote d’Ivoire : « les députés peuvent s’organiser en groupe ou par affinité politique. Ces groupes sont appelés « groupes parlementaires »
Sénégal : « les députés peuvent s’organiser en groupe, par affinité politique »
Ces différentes rédactions sont loin, très loin de la nôtre.
3. La notion de partis politiques (au pluriel) est une curiosité grammaticale. On ne peut pas dire qu’elle entre dans le cadre d’une faute grammaticale assumée par le législateur si on se réfère au développement que nous avons effectué aux points 1 et 2 ci-dessus. C’est donc une curiosité grammaticale et au moins une coquille. Je signale au passage que depuis que nous discutons de ce sujet, personne n’a songé à vérifier le texte original.
Les deux « S » contenus dans les mots « Partis Politiques » constituent une coquille car c’est la première fois que je vois la préposition « Par », exprimant la fréquence, être suivie par des noms au pluriel. (Par heure, par personne, par nuit, par jour, par an, point de S). C’est une coquille et une coquille ne peut pas nous condamner à subir un groupe parlementaire pour le moins hétéroclite.
4. Pour terminer, nous avons souhaité faire tous les développements ci-dessus pour montrer le peu de sérieux des députés de l’opposition. En réalité nous aurions tout simplement dû consulter la version anglaise qui elle parle sans ambages de parti politique sans « S ». Cette version anglaise édicte : « Members of the National Assembly may organize themselves into groups according to political party. No group shall consist of less 15 (fifteen) members, excluding Members of the National Assembly allied to them ».
Pour ceux qui disent que les « S » litigieux reflètent la volonté du législateur à promouvoir les groupes parlementaires transpartisants, j’ai envie de leur répondre que l’esprit des lois n’est pas accroché aux coquilles qui y sont contenues.
Hon. Samuel Dieudonné Moth
Député
Comments