Situé entre le rond-point Kotto Bass et la mairie de Douala 4e, le lieu-dit Sapeur, est impraticable. Les usagers racontent leur calvaire.
L’état du rond-point Sapeur est alarmant. Aller d’un bout à l’autre devient un défi majeur. Des engins lourds peinent à traverser, bloquant ainsi la voie aux autres véhicules. Les embouteillages s’intensifient ; les usagers s’impatientent. Une voix se fait entendre dans la foule : « je suis en retard pour le boulot, laissez-moi passer s’il vous plaît ! » Les plaintes s’enchaînent : « attention ! Ne monte pas sur mon pied » ; « toi aussi avance… ». L’autre réplique : « envole-toi tu traverses». Les engins avancent à pas de tortue, une roue dans le nid de poule, l’autre sur la chaussée. La situation s’empire par le dérapage et la panne de certains camions et gros porteurs.
Dans la foulée, Éric Fansi, conducteur de mototaxi raconte son calvaire : « La route est mauvaise. Plusieurs fois j’ai eu des crevaisons et des éclatements de roue à ce niveau. Je suis une fois entré dans une marre d’eau et sorti de là avec un clou planté dans le pneu. Je suis également témoin des femmes qui y sont de fois tombées des motos ou salies par les marres d’eau».
Ces situations sont parfois lamentables pour certains passagers, notamment pour Martine Ndockle qui ne se remet toujours pas de sa mésaventure plusieurs semaines après les faits : « Je rentrais du marché Sandaga. J’avais acheté du poisson que le moto-taximan avait soigneusement attaché sur le porte bagage. Arrivée au rond-point, un autre moto taximan voulant échapper aux embouteillages, a pris le sens interdit. C’est ainsi qu’il percute notre moto par l’arrière. Les poissons se sont éparpillés sur la chaussée. Je n’ai récupéré que la moitié car le reste avait été écrasé par les motos et voitures venant derrière nous ».
La circulation n’étant pas aisée à cet endroit, certains moto-taximen mettent en pratique plusieurs astuces pour forcer le passage. C’est le cas de Moustapha. « Ce n’est pas facile d’aller à ce rond-point. Nous souffrons trop et les clients ne payent pas assez, on dirait qu’ils n’ont pas conscience du mauvais état de cette route. Il faut 4h de temps pour réparer une panne causée à cet endroit. Au mois de juillet dernier, un camion d’une société brassicole bien chargé de boisson s’y était renversé ». Selon les témoignages recueillis sur les lieux, des accidents de même nature s’y produisent régulièrement.
Dégradation des routes camerounaises
Le rond-point Sapeur résume le piteux état de plusieurs routes camerounaises. Les données consultées par notre confrère EcoMatin, renseignent que le réseau routier en mauvais état s’est aggravé passant de 69,28% en fin décembre 2023 à 71,07% au 15 juillet 2024, soit une accentuation d’environ 1,8% en l’espace de 7 mois. Sur un linéaire global de 121873km, cela représente 86 529,83km de route en mauvais état.
Victime du mauvais état de la voie Yaoundé-Douala-Mutengene, le Délégué général à la sûreté nationale (Dgsn), Martin Mbarga Nguele a fustigé le ministère des Travaux publics dirigé par Emmanuel Nganou Djoumessi : « J’ai été victime au Sud-ouest à Mutenguene. Entre Yaoundé et Mutenguene cela a été un calvaire pour circuler. Je n’avais jamais vécu cette situation auparavant. Le président a donné des instructions. Il y a des membres du gouvernement en place. » Face à cette mauvaise expérience, il s’interroge : « Mais que faisons-nous pour le développement de notre pays ? »
De telles préoccupations taraudent la pensée des Camerounais. Assiaki se questionne également : « Vraiment on ne comprend plus si l’Etat prend soin de toutes les routes. Comment une route qu’on vient d’arranger a déjà les nids de poule ? On ne comprend pas si le matériel est adéquat pour ces routes ou les agents d’entretien prennent suffisamment du temps pour les construire ».
Des interrogations auxquelles le ministre des Travaux publics n’a pas tardé à réagir. « La dégradation de certains axes routiers s’est accélérée pour les causes que sont : Le vieillissement des chaussées ; tous ces axes routiers ont accompli leur durée de vie ; plus de 20ans ; les averses avec d’importantes quantités d’eau qui s’infiltrent sous les chaussées ; les ouvrages de drainage ne sont plus fonctionnels de manière optimale, ils n’ont pas été dimensionnés pour capter les énormes quantités d’eau actuelle ; les entreprises choisies pour réhabiliter ces routes ont un rendement faible, car, les capacités financières sont faibles, les avances de démarrage et les décomptes n’étant pas payés dans les délais », peut-on lire dans une note d’information rendue publique il y a quelques jours par le ministère des Travaux publics.
Maï Fango, stagiaire
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