La correspondance du ministre camerounais de l’Administration territoriale (AT) du 9 octobre 2024 aux gouverneurs des régions continue de faire des vagues. Chacun y va de son interprétation. Certains en profitent pour tenter d’installer un climat de peur dans le subconscient des Camerounais et même de nos partenaires internationaux. Avant de poursuivre, je rappelle que le Syndicat national des journalistes du Cameroun (SNJC) dont je suis membre depuis plus d’une décennie, s’oppose catégoriquement à toute tentative de musellement de la presse camerounaise.
Pour revenir sur la lettre de Paul Atanga Nji aux gouverneurs, rappelons qu’elle s’adresse à une catégorie de personnes et de médias bien précise. Elle vise à apporter une réponse robuste aux rumeurs en circulation sur les réseaux sociaux et même dans certains médias sur l’état de santé du président Paul Biya, absent du Cameroun depuis plus d’un mois.
Pour que ces rumeurs ne persistent pas après les mises au point du ministre Directeur du cabinet civil de la présidence de la République, Samuel Mvondo Ayolo et du ministre de la Communication, René Emmanuel Sadi, qui ont affirmé que le président Biya se portait bien, travaille et vaque à ses occupations à Genève, en Suisse, où il séjourne après le sommet Chine-Afrique. Ces deux sources officielles sont habilitées à communiquer sur l’état du président. Après leurs mises au point, « aucun autre commentaire ou débat ne devrait plus être cautionné, de qui que ce soit dans les médias privés en semaine ou les week-ends », a écrit le ministre Atanga Nji.
Seuls les auteurs des commentaires tendancieux dans les médias et sur les réseaux sociaux sont visés
Si nous sommes d’accord qu’il ne revient pas au ministre de l’Administration territoriale de réguler les médias dans notre pays comme l’a rappelé la présidente nationale du SNJC, Marion Obam sur le plateau de Canal Presse dimanche, je pense également que c’est indécent de spéculer sur l’état de santé d’une personne, même si on détient les preuves. Surtout quand il s’agit de la première institution de la République sur qui reposent tous les intérêts stratégiques. C’est dans cette logique que Paul Atanga Nji a demandé « à chaque gouverneur de créer auprès de ses services compétents, des cellules de veille chargées de suivre et d’enregistrer toutes les émissions et débats dans les médias privés et d’identifier les auteurs des commentaires tendancieux, y compris ceux qui agissent à travers les réseaux sociaux ». Le ministre poursuit : « Tout débat dans les médias sur l’état du président de la République est formellement interdit. Les contrevenants devront faire face à la rigueur de la loi ».
Les Camerounais sont libres de parler de leur président
Dans ces extraits de la correspondance du ministre aux gouverneurs, il n’est nulle part mentionné que les citoyens camerounais ne devraient plus parler de celui qu’ils ont reconduit à la tête du pays en 2018. Cette mesure fortement critiquée, concerne essentiellement les médias audiovisuels (où sont organisés les débats) et les réseaux sociaux (où se tiennent généralement les commentaires tendancieux).
Les sites d’actualités, les blogs et les tabloïds ne semblent pas être concernés par cette mise en garde de Paul Atanga Nji. Du moins, sa correspondance ne les mentionne pas. Ce n’est pas pour autant que les journalistes et blogueurs de ces différents canaux devraient tenir des commentaires tendancieux sur l’état de santé de la plus haute personnalité du pays. Que veut même dire tendancieux ? Selon le dictionnaire Larousse, tendancieux signifie « qui n’est pas objectif, qui manifeste une tendance idéologique, des idées qui déforment ».
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