French President Emmanuel Macron greets Cameroon President Paul Biya (R) prior to a dinner with the participants of the Paris Peace Forum at the Elysee Palace, in Paris, on November 11, 2019. (Photo by LUDOVIC MARIN / AFP)
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Coup d’Etat au Gabon : Paris a-t-il peur de Yaoundé ?

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Le 30 août 2023, le Gabon s’est réveillé sous le régime des baïonnettes et des mitraillettes. Les militaires ont pris le pouvoir.

Passé le moment des foules en liesse qui acclament la fin de règne de la famille Bongo (père et fils depuis 1967), l’on en vient à se poser des questions pour comprendre ce qui s’est réellement passé. Révolution de palais, mainmise de la France, vague de fin de la Françafrique ou simplement reconfiguration de la scène politique gabonaise mettant en lumière un processus électoral tronqué, des questions qui se posent avec acuité.

Le regard est tout même plus questionneur depuis ce 30 août 2023. L’Afrique bouge et se transforme. Plus que de saisir cette dynamique, la presse française s’est trouvée une raison de justifier le coup d’Etat gabonais : Yaoundé doit tomber par un coup d’Etat. En effet, les chaînes de télévision française (LCI, France 24, TV5 monde, France 5 entre autres) font des émissions en boucle sur le futur coup d’Etat à Yaoundé. Alors de quoi Paris a-t-il peur ? Pourquoi créer cette psychose sur Yaoundé au moment où contrairement au cas Nigérien la France conserve une attitude molle sur les putschistes gabonais (pas de sanctions économiques, pas de sollicitation expresse de la CEMAC, pas d’intervention militaire avec un ultimatum à la clé). Dans le jeu gabonais, Yaoundé et dans une moindre mesure Brazzaville au Congo ont-ils contrecarrer les plans de Paris ? Cette grande interrogation appelle quelques points d’éclairage.

1- Élections au Gabon vues du Cameroun.

En sa qualité de pays de la CEMAC et principale destination des produits vivriers Camerounais, le Gabon des élections générales ne peut laisser le Cameroun indifférent. À cela s’ajoute la forte communauté camerounaise qui réside.

Yaoundé a donc certainement suivi de près et même de très près les événements qui se déroulent au Gabon. Candidats, campagne électorale, ralliements et organisation des élections. La grande tension perceptible pendant la campagne électorale ne pouvait ne pas être ressentie à Yaoundé.

2- Gabon, élections, tensions et positionnement des candidats.

À travers des images abondamment relayées sur les réseaux sociaux, le candidat Albert Ondo Ossa, principal challenger du candidat président sortant Ali Bongo a été reçu au Quai d’Orsay. D’ailleurs sur l’une des vidéos, on entend clairement les responsables du Quai d’Orsay lui dire « Monsieur le président, allez nous arranger le pays ». Paris aurait-il fait et cause pour Albert Ondo Ossa contre un Ali Bongo affaibli par la maladie ?

D’ailleurs dans une interview accordée à TV5 monde, le 31 août 2023, Albert Ondo Ossa reconnaît avoir averti le Quai d’Orsay d’un coup d’Etat en préparation. Il apparaît donc qu’un accord a été conclu entre Ali Bongo, Albert Ondo Ossa et Paris pour maintenir les réseaux de la Françafrique au Gabon.

3- le coup d’Etat qui change tout.

Commandant de la garde présidentielle et spécialiste du renseignement au Gabon, le général Oligui Nguema a certainement eu vent de cet accord secret. De plus, il pouvait avoir les informations sur les tendances générales des élections pour connaître la mascarade de la fraude qui a proclamé Ali Bongo vainqueurs. Alors l’occasion faisant le larron et inquiet du sort que pourrait lui reverser le nouveau président, ou encore le vrai vainqueur par les urnes, il a choisi de devenir kalife à la place du kalife en s’alliant toutes les forces armées gabonaises.
Pour sauver la face, Albert Ondo Ossa s’est empressé de crier à une révolution de palais en appelant curieusement la France au secours.

4- Paris et Yaoundé dans tout ça !

Prises de court et incapables de saisir ce mouvement des militaires gabonais, les autorités françaises sont restées muettes toute la matinée du 30 août 2023. Et ce n’est que timidement que dans la soirée qu’elles ont finalement condamné le coup d’Etat et sans mesure de rétorsion comme dans le cas du Niger. Le sort était jeté.

Paris en veut également à Yaoundé, certainement au faîte des événements de Libreville de ne pas avoir joué en sa faveur pour éviter l’aliénation du processus électoral qui devait conduire Albert Ondo Ossa plus fang que Oligui Nguema et par conséquent plus proche de l’identité du président de la République du Cameroun.

On comprend dès lors le tir groupé des médias français sur les autorités de Yaoundé qui sont traitées de tous les noms d’oiseaux depuis ce 30 août 2023. Il faut absolument qu’un coup d’Etat ait lieu à Yaoundé pour, d’une part confirmer la tendance générale de dégénérescence des régimes politiques en Afrique, et, d’autre part, faire payer à Yaoundé son laisser-faire au Gabon et sa proximité de plus en plus croissance avec l’axe des BRICS en témoigne la présence de Paul Biya à Saint-Petersbourg et du premier ministre camerounais en Afrique du Sud. Qu’on se souvienne que les journaux français avaient déjà considéré le voyage de Paul Biya à Saint-Petersbourg comme la plus grande surprise du Sommet Russie-Afrique.

Yaoundé et ses autorités politiques sont désormais dans le collimateur de la France. Les tenants du système Camerounais proches de la France seront certainement dans les jours et les mois à venir l’objet de sollicitation. Et pour les élections générales de 2025, ça promet.

Alphonse Bernard Amougou Mbarga, universitaire 

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