Plongeons dans le quotidien du jeune camerounais qui assiste les femmes en travail.
La maternité Jean Paul II de Logbaba, située dans le 3ème arrondissement de la capitale économique camerounaise affiche fière allure ce mois de juin 2022. Dans la salle d’attente de cette formation sanitaire, plusieurs femmes enceintes sont assises. N’ayant plus de place, d’autres sont restées debout. Visiblement en travail, elles se tordent de douleur. A côté, un jeune homme âgé de 30 ans veille sur elles. Il fait 1m 85 et porte une blouse rose et une babouche blanche.
Son nom est Stéphane Sewa. Il travaille dans cette structure hospitalière depuis quelques années. « Ça fait 3 ans que je suis à la maternité Jean Paul II de Logbaba et 8 ans déjà que j’ai pris contact avec ce corps de métier», nous confie-t-il. Stéphane n’est pas médecin, ni même infirmier. Il exerce une profession où peu d’hommes ont leur place. Il est maïeuticien (sage-homme). «Depuis ma formation j’ai été trop attaché à ce métier de maïeuticien au point où, je faisais des gardes et stages supplémentaires», argue notre interlocuteur.
En réalité, c’est en 2014 que tout bascule pour ce jeune maïeuticien. Étudiant en 2ème année biochimie à l’université de Douala au Cameroun à cette époque, Stéphane qui caressait le rêve de devenir technicien de laboratoire, décide de suivre les recommandations de sa belle-sœur. «Ma profession de maïeuticien je la dois à ma belle-sœur. C’est elle qui m’a proposé en 2014 de postuler pour le concours de sage-femme. À la base je voulais être technicien de laboratoire».
Il poursuit : «J’avais constitué mon dossier pour le concours de l’imagerie médicale mais quand j’arrive on me dit que le concours n’a pas encore été lancé. C’est donc à mon retour à la maison que dans le taxi je médite sur les propositions de ma belle-sœur. C’est ainsi que j’ai changé l’affiche de l’imagerie médicale à celle de sage-femme. Je n’avais aucune idée sur cette profession, ce qui comptait pour moi c’était de quitter le plus tôt possible l’université et faire une formation. Dieu merci avec beaucoup d’enthousiasme j’ai réussi mon concours».
Femmes enceintes
À la maternité Jean Paul II de Logbaba, la salle d’accouchement qui sert de bureau à Stéphane n’est pas autorisée aux visiteurs, encore moins aux journalistes. Ce mercredi 29 juin matin, le «sage-homme» s’apprête à regagner son domicile après avoir travaillé toute la nuit. Au quotidien, le jeune maïeuticien s’occupe de la femme avant la grossesse, pendant et après l’accouchement. Être un homme au sein de cette maternité n’est pas un handicap pour lui. Il n’y voit aucune différence avec ses collègues de sexe opposé. «Ici je joue pratiquement le même rôle que celui de mes collègues femmes : accompagner la femme pendant la grossesse, soigner les petits bobos de grossesse, faire aussi accoucher les femmes par voie basse ou par césarienne», fredonne Stéphane Sewa.
«Quand il y a des complications, ajoute Sewa, j’envoie ces cas chez le gynécologue. Après l’accouchement, je dois faire le suivi post-partum de la mère et l’enfant y compris des conseils d’orientation pour le planning familial».
Etant donné qu’un accouchement peut être douloureux et durer des heures, il est important pour Stéphane d’établir une relation de confiance avec ses patientes. «Vous savez la salle d’accouchement est tellement stressante. Certaines femmes lorsqu’elles sont ici, elles pensent que Dieu les a oubliées. Alors quand une femme est en travail, je lui propose des petites blagues pour évacuer ce stress. Quand elle est en phase d’expulsion du bébé, en ce moment le jeu s’arrête car il faut se concentrer sur l’expulsion du bébé sinon le pire pourrait se produire », explique Stéphane Sewa.
Passionné
Stéphane est devenu une valeur sûre de la maternité et aimerait insuffler une grandeur supplémentaire à sa profession. Susciter des vocations auprès d’autres hommes. «Je suis où il faut et au moment où il faut. Être maïeuticien est un métier stressant et dans le contexte camerounais il n’est pas rentable. Mais quand on accompagne une femme et qu’elle parvient à donner naissance sans complications, le merci qu’elle vous donne dépasse le salaire. C’est une bénédiction. Aujourd’hui beaucoup d’hommes se rapprochent de moi pour savoir comment on fait pour devenir maïeuticien, je leur réponds ne faites pas ce métier pour de l’argent mais parce que vous êtes passionnés», conclut-t-il
Ruffine Moguem
Comments