Cette suppression de l'expression culturelle a eu des effets dévastateurs sur la psyché individuelle et collective, contribuant à un sentiment de dévalorisation qui a même été transporté en dehors du pays. Après l’indépendance, une vague de migrants Camerounais, vers la France notamment, ont inconsciemment renié leur langue ne parlant que le français avec leur enfant, critiquant et dévalorisant leur pays d’origine. Une bonne façon de perdre son identité est de perdre la langue.
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Libérer le Cameroun de ses prisons mentales : comment la thérapie de reconnexion aux mémoires africaines enfouies peut aider à bâtir un pays fier, prospère et solidaire

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Par Antoinette Nyoung, coache, hypnothérapeute, Présidente & co-fondatrice de l’association BLOOM’L, autrice et conférencière 

Tout commence par une histoire. Je marchais avec mon amie et je lui ai fait part de mon envie d’aller vivre et travailler au Cameroun. Je suis née en France et j’y ai toujours vécu, tandis qu’elle est née au Cameroun et est venue vivre en France avec son mari il y a presque dix ans. Sa réponse m’a surpris : « C’est un faux pays ! », m’a-t-elle dit. J’ai éclaté de rire, intrigué par sa réaction. Elle me dit, « tu ne connais pas les réalités de ce pays ». J’ai demandé à mon amie de m’expliquer sa réalité, car en tant que Coache et hypnothérapeute, je comprends que la notion de réalité est totalement subjective et expérientielle. Elle m’a emmené dans ses souvenirs, ses yeux se sont baissés, j’ai perçu de la peur et de l’inquiétude sur son visage alors qu’elle commençait à raconter son récit.

« À huit ans, j’ai vu un policier tabasser un prisonnier qui ne demandait qu’une cigarette. Je ne comprenais pas ». Elle m’expliqua qu’elle avait grandi à Bafoussam, non loin de l’école où il y avait une prison. Pendant la promenade des prisonniers et la sortie des classes, les gardiens emmenaient les détenus marcher dans la rue. L’un d’entre eux s’était éloigné pour acheter une cigarette, mais le gardien l’avait rattrapé et avait commencé à le tabasser. Mon amie revivait cette scène avec émotion, sautant et donnant des coups de pieds, revivant la douleur de cette situation. « Le gars voulait juste fumer », me dit-elle. « Là-bas, pour un rien, ça part en vrilles », ajouta-t-elle. Elle poursuivit en me racontant une autre expérience : « Je marchais dans la rue avec mon mari, nous avons croisé un policier qui l’a giflé devant moi, sans aucune raison apparente. Choquée, je lui ai dit de continuer son chemin sans rien dire ». « Mais pourquoi as-tu laissé faire ? » lui demandai-je. Elle me répondit : « Je me suis souvenu comment le gardien avait mis le prisonnier à terre, alors il vaut mieux ne rien dire et continuer ». Elle avait huit ans lors de la première scène et dix sept ans lors de la seconde.

L’histoire de cette compatriote qui est la nôtre aussi rappelle que le développement de notre pays résidera sur sa capacité à se libérer les camerounaises et camerounais des prisons mentales qui limitent leur potentiel. En effet, les approches thérapeutiques centrées sur une transformation en profondeur des mentalités telles que la thérapie de reconnexion aux mémoires africaines enfouies (R.AM.A.E.), offrent un outil puissant pour libérer la population des schémas de pensée limitants, favoriser la résilience et promouvoir un changement positif et durable pour un Cameroun fier, prospère et solidaire.

Prisons mentales

Le Cameroun, comme de nombreux pays africains, porte le poids des prisons mentales qui ont été transmises de génération en génération. Ces prisons mentales sont des schémas de pensée limitants, profondément ancrés dans l’histoire et la culture du pays. Elles ont contribué à façonner l’identité collective du pays, mais ont souvent entravé son plein potentiel de développement et de progrès. Elles influencent la façon dont les individus perçoivent le monde et se perçoivent eux-mêmes, et ont un impact significatif sur la société dans son ensemble. Parmi les prisons mentales les plus prédominantes au Cameroun, on trouve la mentalité de dépendance vis-à-vis du pouvoir, héritée de la colonisation. Cette prison mentale a créé une mentalité de soumission et d’attente envers les dirigeants politiques, renforçant ainsi les cycles de corruption et de mauvaise gouvernance. De plus, la mentalité de division et de tribalisme est une autre prison mentale qui entrave l’unité nationale et empêche la pleine réalisation du potentiel collectif du pays.

Ces prisons mentales entraînent des répercussions profondes sur le développement du Cameroun. Elles alimentent la méfiance, la division et l’instabilité sociale, entravant ainsi les efforts de construction d’une nation solide et unie. Elles freinent également l’innovation, la créativité et la prise de risque nécessaire à la croissance économique et sociale.

Au Cameroun, la soumission à la violence est devenue malheureusement une réalité quotidienne pour de nombreux citoyens. Les actes de violence, qu’ils soient liés à la criminalité, aux conflits intercommunautaires ou à d’autres formes d’agression, ont un impact dévastateur sur la vie des individus et sur la société dans son ensemble. L’absence d’un système de justice dissuasif efficace y contribue grandement. Lorsque les citoyens ont peu confiance dans le système judiciaire pour punir les auteurs de violences et rendre justice, cela crée un climat d’impunité et alimente le cercle vicieux de la violence. Les individus se sentent alors démunis et désespérés, vivant dans la crainte constante d’être victimes d’actes violents sans qu’aucune mesure ne soit prise pour les protéger. Cette situation a un impact profond sur la psyché collective de la population camerounaise. La peur et l’insécurité généralisées affectent la confiance entre les individus et entravent les interactions sociales. De plus, la violence perpétuelle engendre un sentiment de résignation et de pessimisme quant à l’avenir du pays. Ces problèmes ont créé des prisons mentales qui inhibent le potentiel de développement et de progrès du pays. Il est donc impératif de libérer le Cameroun de ces prisons mentales pour permettre au pays de se réinventer. Cette libération passe par un travail profond de transformation individuelle et collective.

Racines hypnotiques

Pour y parvenir durablement, l’individu ou le groupe doit s’appuyer sur la méditation voire l’hypnose. L’hypnose puise ses racines étymologiques dans le grec Hypnos, Dieu du sommeil, fils de l’Erebe et de la Nuit et de frère jumeau de Thanatos (la mort). L’état d’hypnose s’apparente au sommeil par l’aspect somnolent du corps. Mais, contrairement au sommeil, l’hypnose est un état de veille et de conscience élargie : état de concentration extrême dans lequel on est très lucide et créatif. C’est un mode de fonctionnement psychologique dans lequel nous sommes détachés de la réalité consciente et ordinaire pour fonctionner au niveau inconscient et élargi. En état d’hypnose, l’esprit est en éveil. L’état de conscience élargi dans lequel se trouve une personne sous hypnose permet une plus grande suggestibilité dans le but de favoriser des changements psychiques, physiques, comportementaux et même neurobiologiques.

Cet état provoqué dans l’hypnose permet de découvrir et de puiser en nous, dans notre inconscient, des solutions naturelles efficaces, restées latentes, pour résoudre nos difficultés et réveiller nos facultés endormies. C’est une porte d’accès pour développer notre potentiel individuel et collectif et ainsi dépasser nos limites ordinaires et nos conditionnements éducatifs. Notre mental est l’acteur de notre souffrance parce que nous le subissons. Pourtant il est capable d’organiser la guérison par le même chemin pour inverser le processus.

L’hypnose est une technique ancestrale longtemps marginalisée mais qui a toujours fait preuve d’efficacité :

  • 6000 av. JC. En Mésopotamie : des manuscrits révèlent les premières traces « d’états modifiés de conscience » à cette époque et l’importance de la guérison par la parole.
  • 3000 av. JC. En Egypte : une stèle décrit une séance d’hypnose sous le règne de Ramses II pour motiver les troupes.
  • 1700 av. JC : On peut lire sur le papyrus d’Ebers « Pose ta main sur la douleur et dis que la douleur s’en aille ».

Dans le monde entier, les chamans, les druides, les marabouts, les ngangas, les sangomas ou les prêtres pratiquent déjà depuis toujours des coutumes ou des rituels de soins rappelant certaines hypnoses pratiquées aujourd’hui. Ces praticiens utilisent des méthodes de suggestion, de visualisation de transe et de communication avec l’inconscient pour aider à traiter diverses affections, y compris les troubles physiques, psychologiques et spirituels.

L’état de conscience élargie induit par la transe hypnotique, connecte ainsi l’esprit au corps et permet de contrôler le corps, de lui ôter toute sensation de douleur. Par exemple, l’ukwaluka est un rituel de passage à l’âge adulte pour les jeunes hommes. Il s’agit d’une pratique qui est principalement associée aux cultures xhosa et ndebele en Afrique du Sud et au Swaziland. Il est généralement pratiqué entre l’adolescence et le début de l’âge adulte, et il est considéré comme une étape cruciale dans la vie d’un homme. Le rituel a pour objectif de marquer la transition de la jeunesse à l’âge adulte, d’enseigner les responsabilités et les valeurs culturelles, et de préparer les jeunes hommes à leurs rôles futurs au sein de la communauté. Lors de l’ukwaluka, le nombril du jeune homme est transpercé à l’aide d’une lance spéciale. Cette pratique est censée symboliser le passage de l’enfance à l’âge adulte et représenter le courage, la force et l’endurance. Le transpercement du nombril est souvent réalisé sans anesthésie, ce qui en dehors d’une transe hypnotique profonde provoquerait une expérience extrêmement douloureuse pouvant causer la mort. Or, on voit bien sur internet des vidéos d’hommes se relevant et traversant le village avec leur lance traversant leur corps. Tout ceci n’est pas de la sorcellerie !

Chaque être humain, tout au long de la journée expérimente des états plus ou moins profonds de transe hypnotique mais ne les utilise pas consciemment pour se transformer et transformer son environnement. Pratiquer l’hypnose permet à chaque individu de se reprogrammer et de reprendre le contrôle sur sa vie.

Thérapie de choc

La thérapie RAMAE s’appuie sur les bases de l’hypnose et de la méditation pour favoriser le changement de mentalité et le réalignement aux valeurs africaines.

Prendre conscience de l’existence de nos prisons mentales et de leur impact sur la société est une priorité. Cela nécessite une introspection individuelle et collective, ainsi qu’une reconnaissance des schémas de pensées qui limitent la créativité, l’innovation, l’épanouissement personnel et la croissance collective. En identifiant ces prisons mentales, il devient possible de les remettre en question et de les transcender.

Rappelons-nous nos valeurs et notre histoire, rappelons-nous les événements douloureux et traumatiques qui nous ont arrachés à la nature, piétiné notre dignité et fait entrer dans nos cœurs la peur, la honte, la violence et la corruption. Pour nous permettre de nous reconnecter aux mémoires africaines, réinculquons à nos jeunes, le sens de la communauté et de la famille, le respect des aînés, la solidarité et l’entraide. Osons de nouveau entrer au cœur de nos forêts pour communiquer et communier avec la nature, nos ancêtres, retrouvons notre spiritualité africaine et nos croyances en l’au-delà. Retrouvons l’honneur et la dignité que des billets de banques ne peuvent pas acheter. Allons réactiver chez nos aînés la sagesse et la joie de la transmission, ouvrons de nouveau leur cœur à l’hospitalité. Retrouvons la saveur du travail et de l’effort acharné.

La thérapie RAMAE offre des outils et techniques puissantes pour travailler sur ces prisons mentales et se reconnecter à ces mémoires. En accédant à l’inconscient, afin de reprogrammer les croyances limitantes, comme on le ferait avec un ordinateur. Cette thérapie offre l’opportunité de créer de nouvelles perspectives, d’amplifier la confiance en soi, de renforcer l’estime de soi et de développer une vision positive de l’avenir.

En reconnectant le peuple camerounais à ses mémoires et valeurs profondes, la thérapie RAMAE peut également aider à surmonter les divisions et les barrières mentales qui entravent l’unité nationale en reprogrammant les esprits, en développant dès le plus jeune âge la connaissance de soi. En encourageant l’empathie, la compréhension mutuelle et la communication constructive, elle peut favoriser la réconciliation et la solidarité entre les différentes communautés du Cameroun. Le Cameroun pourra ainsi espérer créer un environnement plus sûr, où la violence est découragée et où les citoyens se sentent protégés et écoutés.

La thérapie RAMAE va jouer un rôle important dans cette réinvention en encourageant les comportements responsables et durables. En renforçant la motivation intrinsèque et en renouvelant les schémas de pensée axés sur la croissance personnelle et le bien-être collectif, elle peut aider à cultiver une mentalité de progrès, d’innovation et de responsabilité sociale.

Pour réaliser cette transformation, il est nécessaire de diffuser largement la connaissance et la pratique des outils de reconnexion et de transformation utilisés dans la thérapie RAMAE. Cela peut être réalisé grâce à des programmes d’éducation et de sensibilisation, en formant des professionnels qualifiés dans les domaines de l’hypnose et de la PNL et en intégrant ses principes et ses techniques dans divers domaines de la société. Ces professionnels ainsi formés pourront jouer un rôle clé en accompagnant les individus et la société dans ce processus de réinvention.

En libérant les individus de leurs prisons mentales, la thérapie RAMAE favorise l’émergence d’une nouvelle génération de leaders et d’acteurs engagés, prêts à prendre des initiatives et à créer un changement positif dans tous les domaines de la société. Cette transformation individuelle contribuera inexorablement à la construction d’une nouvelle identité nationale, basée sur la fierté, la prospérité et la solidarité. Nous devons combattre les prisons mentales qui nous enferment et prendre notre place à la table des dirigeants du monde.

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