Le sport est par excellence le meilleur vecteur de soft power sur le plan de l’influence. Les crues du diktat suprémaciste imposé par les puissances occidentales sur les marqueurs de puissance, se déversent aussi dans le sport qui, jusque-là, était supposé rassembler des peuples par l’amitié…
Patrice Motsepe, président de la Confédération africaine de football
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Football : c’est le moment pour l’Afrique de se réveiller

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Par le Dr Didier BADJECK

Cameroon Consulting and Prospective

 Le sport est par excellence le meilleur vecteur de soft power sur le plan de l’influence. Les crues du diktat suprémaciste imposé par les puissances occidentales sur les marqueurs de puissance, se déversent aussi dans le sport qui, jusque-là, était supposé rassembler des peuples par l’amitié…

 La CAF, encore plus transparente et impuissante dans le landerneau footballistique ?

Lorsque les candidats à la présidence de l’instance faitière mondiale du football sont en manque de voix pour présider aux affaires de la FIFA, c’est dans le vivier des 56 fédérations africaines qu’ils affluent et piochent, avec en bascule, des promesses toutes aussi mirobolantes qui profiteraient au football africain soi-disant, pour son décollage et sa promotion. Sitôt élus hélas, ces dirigeants ont tôt fait d’être frappés d’amnésie, la CAF et ses fédérations ne constituant que des instances de second ordre, meublant la mondialité de la FIFA. En termes d’influence, la CAF arrive derrière toutes les autres confédérations, malgré le talent inépuisable que le continent fournit à un très haut niveau. Hier les MILLA Albert Roger, Thomas NKONO, Rabah MADJER, Jay-Jay OKOCHA, Georges WEAH, Didier DROGBA et Samuel ETO’O ont illuminé les terrains de leurs prouesses inégalées, certains étant d’ailleurs privés du sacre du ballon d’or à cause du déni de faciès. Aujourd’hui, les talents ne sont pas moins éloquents avec les Sadio MANE, Mohamed SALAH, Idrissa GUEYE, Riyad MAHREZ et la liste serait encore plus impressionnante si certains africains, véritables piliers des équipes nationales européennes revenaient à leurs nationalités d’origine. Toutes les équipes nationales européennes sans exception ne se privent plus de talents africains sur lesquels elles jettent leur dévolu, en agitant tels avantages pour les empêcher un retour au pays natal. Si cela est considéré comme un élan de brassage multiculturel louable, l’Afrique ne devrait pas perdre pour autant au change, recevant en retour de cet investissement consistant, la place qui lui est désormais réservée aujourd’hui, celle d’un continent qui n’a rien à dire quand le gotha du football mondial éternue, une Afrique seulement bonne à recevoir aimablement les postillons néocoloniaux de la nouvelle géopolitique du football.

L’Afrique du football n’a qu’un seul rendez-vous tous les deux ans, c’est la Coupe d’Afrique des Nations où tels des esclavagistes, les recruteurs avides de pépites se précipitent autour de jeunes rêvant aussi de lendemains meilleurs. Mais demain, à valeur égale, ces joueurs n’auront jamais la même considération que leurs coéquipiers européens ou sud-américains, recevant au passage quelques cris racistes et simiesques venant des tribunes. Nous avons aussi compris que les doubles nationalités étaient fluctuantes pour les Africains de souche, au gré de leurs défaites ou de leurs victoires. Ce fut par exemple le cas du Français Yanick NOAH qui gagnait le tournoi de Roland Garos et du Camerounais Yanick NOAH qui perdait à Wimbledon dans la foulée. Au-delà de l’idée suprémaciste, se situe aussi l’avilissement du sport africain comme le footballeur Samuel ETO’O, désormais Président de la FECAFOOT l’a si bien évoqué au cours d’une interview récente délivrée sur France 24. Et c’est pourquoi il faudra des icônes pour faire écho de nos misères.

C’est ce rendez-vous africain que le football mercantile voudrait travestir aujourd’hui et malaxer au gré des aspirations du profit, pour l’espacer sur des périodicités plus distancées correspondant à l’éructation de la FIFA, repue de ses dividendes du football-business amassés au fil des compétitions. Toutes les idées lumineuses du football-business y passent, coupe du monde des clubs à 24, coupe du monde des nations tous les deux ans, bref, le soleil doit se lever en occident et se coucher en occident.

C’est le moment de faire entendre la voix des Africains

Devant une telle asymétrie d’influence, c’est aux Africains aussi de changer de paradigme en réorganisant déjà en profondeur le football africain pour que le footballeur vive de son art, en lui octroyant de véritables ressources et en installant des garrots sur l’hémorragie des jeunes talents vers l’étranger. Un paramètre plaide au moins à cette perspective, partant d’une considération du reflet géostratégique. Malheureusement les Africains sont les seuls à ne pas savoir ce qu’ils seront en 2050, le pôle alternatif d’une croissance mondiale désormais en chute libre et d’une démographie occidentale inexorablement soumise au rythme de la décadence. Les prospectives économiques situeraient le Nigéria comme la 9ème puissance mondiale en 2050, devant l’Allemagne.  C’est une loi équilibrée de l’histoire cyclique des civilisations qui s’applique. L’attitude des chatons apprivoisés qui émettent au plus leurs timides préoccupations devrait laisser la place aux postures courageuses, combattantes et militantes, tel le débrayage de la Coupe du Monde qui ne nous apportera rien que le rôle figuratif que l’Afrique occupe. L’organisation de nos propres compétitions sous l’égide de nouvelles instances faitières plus justes et équitables pourrait aussi apparaître comme une alternative. La boxe nous en a fait la démonstration avec la création successive de plusieurs organisations à la suite de la World Boxing Association (WBA) et de la World Boxing Council (WBC), dont la suprématie asphyxiante des années 50, a favorisé l’éclosion de la World Boxing Organization (WBO), de l’International Boxing Federation (IBF), ou de la Global Boxing Union (GBU). Aujourd’hui ces fédérations organisent des compétitions pour des sacres unifiés, certaines ne pouvant plus prétendre au règne absolu. C’est à cela que l’on devrait soumettre la FIFA, elle qui se permet toutes les initiatives et intimidations au gré du capitalisme et du lobbyisme sportif.

Pour la CAN 2021, aucun pays n’est suicidaire au risque de faire prévaloir l’insécurité sanitaire au profit d’une compétition. Mais c’est à nos dirigeants politiques et sportifs cependant et encore une fois, de prendre des décisions en toute responsabilité et souveraineté. Ces décisions, même celles concernant les jauges des spectateurs seront prises en fonction des réalités et en toute indépendance, sans l’immixtion de tiers européens, trop imbus à ne faire valoir qu’inélégamment leurs intérêts. Les termes d’entente de la prochaine élection du président de la FIFA devront se conformer désormais aux engagements écrits du candidat que l’Afrique devra soutenir, contrairement aux usages d’antan construits sur quelques boniments électoralistes très évanescents. Encore que soutenir la candidature d’un Africain à ce poste devrait cesser d’être un mirage.

S’agissant de la CAN 2021, le compte à rebours a d’ores et déjà commencé et au Cameroun de mettre en place l’organisation exceptionnelle de plusieurs années d’efforts ; aux Camerounais de s’investir pleinement à la réussite de cet évènement où la jeunesse africaine peut espérer démontrer aux yeux du monde, une lueur d’espoir de sa renaissance. Ceux qui s’apprêtent à nuire à la messe du football africain ou à jouer les trouble-fêtes et les rabat-joie auront toute l’Afrique contre eux.

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